Parmi toutes les merveilles que Père avait créées, l'espèce humaine se démarquait sans conteste comme la plus captivante. Elle ne cessait de m'impressionner jour après jour, et je n'étais pas le seul ; même Père en était tout autant fasciné. Les humains pouvaient osciller entre le meilleur et le pire, nuisibles parfois pour son prochain tout en faisant parfois preuve d'une détermination remarquable face aux épreuves de la vie. Ils possédaient ce petit quelque chose, cette flamme que Père chérissait tant : l'espoir. Je devais admettre que j'ai beaucoup appris en les observant, surtout en les côtoyant.

Cependant, je mentirais si je prétendais les avoirs cernés. Malgré le fait que j’étais l'une des créatures les plus anciennes de la création, les humains demeuraient toujours une énigme pour moi, particulièrement en ce qui concernait leurs choix. Juste après avoir assisté à la mort tragique d'un être cher, Elena a pris une décision audacieuse : fonder la rébellion. Cette initiative fut d'ailleurs l'une des raisons qui m'ont poussé à la protéger. Vous comprendrez donc mon étonnement lorsqu'elle s’est retrouvée dans les bras d'une créature infernale, une décision en apparence contradictoire. Aujourd'hui, cette relation contre nature a été étouffée, mais cela n'a en rien amélioré nos relations. Aux dernières nouvelles, Elena s'était mise en couple avec un possédé. Comprendre ses choix de vie restait pour moi une énigme, que j'aurai toujours du mal à saisir.

Assis au dernier banc dans une Église, j'attendais avec impatience le rendez-vous que j'avais fixé avec Elena à l'ancien quartier général de la résistance. L'Église, déserte à cette heure tardive, laissait filtrer une lumière tamisée à travers ses vitraux, créant une atmosphère empreinte de solennité. Mon regard se perdait dans le vide en fixant l'autel devant moi, les pensées tourbillonnant dans mon esprit. J'avais transmis mon message par l'entremise d'un membre de la résistance, et l'attente semblait s'éterniser. Les minutes s'étiraient, devenant des heures, tandis que l'ombre de la nuit enveloppait peu à peu l'église. Soudain, une prière résonna dans mon fort intérieur. C'était le signal d'Elena. Ses paroles, véhiculées par ce lien spirituel, me parvinrent. À travers les mots sacrés, elle m'indiquait qu'elle était sur les lieux.

Je me téléportai sur l'ancien terrain qui avait autrefois abrité le QG de la résistance. La nuit s'était installée, enveloppant le lieu d'une obscurité profonde. Il était environ 22 heures, et le terrain, jadis chargé de vie et d'activité, se dressait maintenant vide. Aucun bâtiment ne s'élevait, seulement des vestiges silencieux de ce qui avait été. Le froid mordant, accentuant l'atmosphère de désolation qui régnait. Les échos du passé semblaient flotter dans l'air, rappelant les jours où le QG était le centre névralgique de la lutte contre les forces obscures. Dans un bruissement d'ailes, je me suis téléporté dans le dos d'Elena qui attendait dans cette obscurité glaciale. Sa silhouette se dessinait devant moi, un halo de détermination illuminant son visage. La surprise dans ses yeux témoignait de l'efficacité de ma téléportation.

Elle put remarquer que mes yeux s'étaient illuminés d'une lueur divine, avant de s'estomper aussitôt. Elle s'est excusée pour son retard, mais je ne lui en tenais pas rigueur. La patience était l'une de mes vertus, et son manque de ponctualité n'était qu'un détail à mes yeux.

-Bonsoir, Elena, saluai-je, mon ton demeurant impassible. Il n'y a pas lieu de s'excuser. La fluidité du temps est relative pour des êtres tels que nous. Je plongeai dans un silence momentané avant de poursuivre, mon regard fixé sur elle sans émotion apparente.

-Comment vas-tu depuis la dernière fois que nos chemins se sont croisés ? Le temps a passé, mais je perçois que tu portes le poids de l'expérience sur tes épaules. Un sourire factice se dessina sur mon visage, un simulacre d'émotion humaine. Les événements ont-ils laissé des traces profondes en toi ? C’était ma façon à moi de prendre ses nouvelles.