Je n'avais pas réussi à me sortir cette discussion de la tête depuis ce matin. Les sms de James étaient gravés dans mon esprit alors que je conduisais jusqu'au lieu de rendez-vous. L'endroit était en bordure de ville, près de l'ancienne usine qui était selon certaines sources l'ancien QG de la résistance. S'il avait choisi ce lieu éloigné, c'était probablement pour rester discret. Et s'il refusait de dire les choses par téléphone... c'était que c'était horrible. Non ? Je m'interrogeais sur ce qu'il avait pu trouver depuis ce matin et je n'arrivais pas à trouver, à comprendre. Comment l'aurais-je pu ?

« Patiente, il te diras bientôt. »

M'invectivais-je alors que j'arrivais à destination. Je ne voyais aucune voiture devant la vieille station essence abandonnée qui se dressait devant moi. Je pouvais deviner bien plus loin la silhouette des décombres de l'ancienne usine. Mais il n'y avait pas un signe de vie par la bas non plus, et pour le moment, pas un signe de James. 21h58 J'étais arrivée légèrement en avance, et m'étais même fait violence pour ne pas partir plus tôt, sachant que ce serait inutile, malgré mon envie de presser la chose.

« Il ne reste plus qu'a patienter... » Songeais-je en m'asseyant à moitié sur le capot de ma voiture. Patienter... il ne restait que ça à faire, n'est-ce pas ?

Seules quelques minutes avaient passé, mais j'avais l'impression qu'il s'agissait d'une éternité. James était légèrement en retard. 22h02. Rien de bien méchant en soit, mais je m'interrogeais depuis ce matin sur ce qu'il pouvait avoir trouvé et il était difficile de faire abstraction. Pourtant, je me faisait violence et attendait. Ne souhaitant pas le brusquer alors qu'il me rendait déjà un service. Il voulait m’annoncer un truc grave, un truc...

« Je réfléchi trop je crois... » Songeais-je à voix haute en levant le regard pour admirer les étoiles et les aurores qui décoraient le ciel.

« Oui... définitivement ! Je réfléchis trop. » Fis-je pour moi même, tentant au maximum de décrocher et de rester concentrer sur le paysage pour éviter de m'impatienter.

22h15 Le temps passait et je devais bien avouer que je commençait à m'inquiéter. James était normalement ponctuel et ça ne lui ressemblait pas de ne pas prévenir. J'avais donc envoyé un sms rapide, pour vérifier que tout allait bien.

« Tout va bien ? Je suis sur place, je t'attends. Je commence à m'inquiéter. » J'avais attendu un peu, mais toujours pas de réponse. Pour le moment du moins.

« Peut-être qu'il est sur la route... » Songeais-je, me forçant à être patiente et attendre encore un peu avant de tenter d'appeler. Je ne voulais pas paraître insistante. Après tout ça n'était que un quart d'heure de retard.

Je m'étais convaincue de patienter encore une dizaine de minutes avant de m'inquiéter réellement et l'appeler. Après tout, au bout de près d'une demi heure de retard, il paraitrait normal que je ne me contente pas d'un message sans réponse ou d'attendre sans nouvelles.

22h32 Cette fois, j'étais vraiment inquiète. J'avais mon téléphone en main depuis près de dix minutes et avait passé ce temps à regarder l'heure et me faire violence pour ne pas appeler avant une demi-heure de retard. Mais là... je considérait qu'il n'était plus vraiment déplacé d'insister. J'avais donc déverrouillé l'écran et fouillé mon répertoire pour trouver le numéro du prophète. J'avais attendu qu'il se compose et... une sonnerie. Deux sonnerie...

C'était étrange, je n'étais pas certaine de ce que j'entendais. J'en étais déjà à quatre ? Une nouvelle sonnerie avait retentit, suivie de peu d'une sorte d'écho et soudain, j'avais comprit. Le bruit que j'entendais ne venait pas seulement du téléphone. Mon cœur s'était serré dans ma poitrine alors que je regardais autour de moi et percevais un bruit lointain, venant du bâtiment abandonné. Je raccrochais subitement, sans réfléchir et regardait la vieille station essence de loin. Appuyant de nouveau sur le bouton, je rappelais et baissait la main, ne me fiant à présent, qu'au son que j'entendais sur place.

« Ja- James ? » fis-je, péniblement, craignant plus ne pas avoir de réponse qu'en obtenir une. Quelque chose clochais férocement. C'était le portable de James que j'entendais sonner. Il était là depuis le début et...

Je refusais de penser ou d'imaginer quoi que se soit, me forçant à avancer l'esprit le plus vide possible. J'avais finalement rejoins la porte entrouverte du bâtiment abandonné et l'avait passée, la boule au ventre. La sonnerie se faisait de plus en plus forte, jusqu'à ce qu'elle se stop nette, à cause du répondeur. J'étais alors entourée par un silence glacial, m'éclairant seulement de la lampe de mon téléphone et je contournais le comptoir pour vérifier le lieu d’où était parvenu le son. Quand mes yeux s'étaient arrêtés sur la masse au sol, je m'étais sitôt tétanisée. Seul un son, presque un souffle, s'était échappé de mes lèvres :

« Non... » J'avais senti mes jambes se dérober sous mon corps et j'étais tombée, à genoux, à coté de lui. Rassemblant le peu de courage qu'il me restait, j'avais fini par glisser doucement vers lui et portait une main à son coup pour chercher un pouls. « Ja- James ? » Répétais-je, difficilement, alors que je ne sentais rien battre sous mes doigts. « Ja- James ? » Je portais une main tremblante à ma bouche pour étouffer les pleures et composait le 911 sur mon téléphone...