Complexes. C'était probablement le mot adéquat pour les définir. Du moins, c'était le plus adapté compte tenu de nos lacunes les concernant. Particulièrement, de mes lacunes. La vérité cela dit était probablement toute autre. Plus complexe, justement. Car ils étaient tous différents et similaires à la fois, comme nous. Pourtant, ils ne fonctionnaient pas comme nous. Et chaque interaction avec eux me laissait perplexe. Car je n'étais jamais complètement certain de ce que je voyais en eux, ou d'avoir choisi les bons mots pour m'adresser à eux.

Cependant, cette fois, il me fallait faire tout ce qui était en mon pouvoir, pour formuler les choses de la bonne façon. Je n'étais pas sûr d'y parvenir, mais je me devais d'essayer au mieux. Car cette fracture qui existait entre humain et divin, n'était pas que symbolique. Cette distance était bien réelle et elle s'était immiscer entre plusieurs de mes protéger et moi. Nos liens en étaient affectés et j'avais peur qu'ils finissent par le rompre totalement. Je n'étais pas le seul ange dans ce cas. Mais je ne pouvais pas régler cela pour tous les anges, seulement pour moi et mes protéger. Du moins, je pouvais tenter de le faire.

Ils acceptaient de m'aider dans cette tâche et je les remerciaient d'une inclinaison de la tête respectueuse. Après quoi, j'entendais répondre à leurs paroles et avancer dans notre tâche.

« La mission est particulière. Ce n'est pas dans mon habitude d'agir autrement que pour protéger ou traquer. Cette fois, il me faut parler, uniquement. Et trouver les mots pour rétablir la confiance qui existait entre humains et anges. Plusieurs de mes protégés ont été... affectés par notre intervention lors de l'épidémie. Ils ont été de ceux qui ont reçu les visions envoyées par l'Enfer. J'ai tenté de parler avec eux à l'époque, mais j'ai peur de n'avoir pas réussi à arranger les choses. »

Je m'étais montré honnête et avait tenté d'expliquer la décision de Dieu et nos actions. Mais rien de tout ça n'avait fonctionné. Pas avec eux, du moins. Seuls deux humains avaient semblé accepter, sans pour autant que nos liens restent intacts. Pour ce qui était des autres... la situation était bien pire.

« Il nous faut tous, essayer de rétablir cette confiance. Chacun à notre échelle. Le lien entre humanité et divin est trop important pour être entaché de la sorte. Spécialement dans un contexte comme celui-ci. Mais... j'ignore comment leur parler réellement et quand il s'agit d'un sujet comme celui-ci... Les répercussions sont catastrophiques. »

Mes paroles étaient nombreuses, plus que je n'aurait voulu. Mais expliquer une chose pareille, même à mes frères et sœurs était étrange et compliqué. Car je n'étais pas certain de ce qui avait provoqué cette brisure. Je savais qu'il s'agissait d'émotions ou de sentiments humains, liés à la destruction des malades. Mais je n'était pas certain de pouvoir réellement déterminé lesquels ou de pouvoir les saisir et les apaiser.

« Vos missions sont liées à l'humanité, aux sentiments qu'ils ressentent ou à leurs âmes... J'avais donc espoir que vous puissiez me conseiller, afin que je puisse leur parler et atténuer leurs... Rétablir nos liens, tels qu'ils étaient. »

La religion humaine, voila quel sujet Amiel avait abordé en premier lieu. Il semblait penser que cette information était liée à ma demande et il n'avait pas tord. Car plus son discours avançait, plus je comprenais ses mots. Néanmoins, si cela expliquait en partie certaines choses, cela ne me donnait pas d'indications sur la marche à suivre. Son conseil suivant, le faisait. Mais comme il le disait, cela prenait du temps qu'il ne m'était probablement pas possible de prendre. D'autant plus si on considérait qu'il m'aurait fallu le faire avant. Avant que cet ordre ne soit donné et que certains humains perdent confiance.

Aujourd'hui, comment pouvais-je ne serait-ce que tenter pareille approche, s'ils ne me faisaient pas confiance au préalable ? Cela pouvait être une solution envisageable seulement pour ceux qui n'étaient pas déjà au courant de ma nature. Pour les autres... Je n'étais pas certain d'être capable de tant... d'humanité. Mais il était encore moins envisageable que je puisse user de cette méthode avec ceux qui savaient déjà que j'en manquait.

Je restais silencieux, absorbant ses mots, puis me tournait vers Imamiah lorsqu'elle avait prit à son tour la parole. Il était temps d'écouter leurs conseils, non pas de parler moi même. Ses premiers mots étaient plus tranchés que ceux d'Amiel. Non pas que s'eût-ce été un mal. Au contraire, l'explication qui s'en suivait était pleine de vérité et de sens. Malgré tout, je n'était pas forcément du même avis que ma sœur. Non pas qu'elle ai tord. J'étais convaincu qu'elle avait raison sur bien des points. Cependant, tous les humains n'étaient pas pareils et ce qui était vrai dans son discours, pour certains... ne l'était pas vrai pour d'autres. Je n'étais, d'ailleurs, pas sûr que ce soit le problème que j'avais avec la plupart de mes protégés. Elle avait terminé avec des conseils plus précis, bien que vagues. Ainsi, après un instant de réflexion, j'avais rétorqué :

« Toutes vos paroles sont censées. Malheureusement, j'ai peur qu'aucune ne m'aide réellement. » Ils n'étaient pas en cause. J'avais peur que la cause était bien plus importante que cela. Imamiah l'avait dit, Amiel aussi à sa façon.

« Je tente déjà de m'adapter, autant qu'il m'est possible de le faire. Mais, ce n'est pas chose aisée. C'est presque... impossible, pour moi. Car je suis incapable de cerner les humains et leurs sentiments, à moins qu'ils soient flagrants ou me soient clairement annoncés. Je ne peux pas savoir, simplement en m'entretenant avec eux, qu'elle approche est la meilleure. Mon questionnement est constant lorsque je suis près d'eux. Sur les mots à choisir, la façon d'aborder un sujet ou un autre... J'ai pour mission de traquer les traitres à notre armée. Je ne pense pas être fait pour cela. » Cette information pouvait être problématique, car je n'était pas le seul dans ce cas. Ainsi, les paroles d'Imamiah prenaient encore plus de poids.

« Mes liens avec ces humains me forcent cependant à tenter de rétablir ce qui à été brisé. Non pas au nom de leur religion que tu dis en déclin et qui nous importe peu... » Expliquais-je, m'adressant à Amiel. Puis, regardant Imamiah, j'avais ajouté :

« Ni même pour établir une confiance que tu juges impossible. » Je prenais une courte pause et regardait au dessus de nos têtes, le plafond orné de l'église, pourtant abimé par endroits.

« Nous le devons pour Père. Pour l'humanité. J'entends vos paroles, je comprend leur sens et je suis d'accord avec vous sur bien des points. Seulement... il y a une chose pour laquelle les humains peuvent nous faire confiance, religion ou non. Quoi qu'il arrive, nous feront tout pour protéger ce monde et le préserver de Lucifer et de l'Enfer. Nous pouvons être leurs alliés. Nous pouvons faire preuve d... » Je m'étais coupé, une idée me traversant l'esprit. Je m'étais probablement trop avancé en pensant que leurs mots ne m'avaient pas aidé. Ce ne serait pas une solution pour tous les humains concernés. Mais cela pourrait l'être pour les résistants. Cependant, d'autres opinions étaient les bienvenues, avant de proposer ce chemin d'action à Dieu. Encore une fois, ils faisaient partit des anges les plus à même de répondre à ma question et m'aider.

« L'urgence tiens en la résistance. Nous devons rétablir un lien avec eux. Alors, ma question est la suivante. Pensez-vous possible de réconcilier nos armées, en leur offrant une promesse ? Celle d'être honnête et transparents quant à nos actions, toutes celles qui les impliquent, j'entends ? Peut-être, grâce à des émissaires liés à la résistance... Ou bien, par les prophètes eux-même. » Il ne s'agirait pas là de leur demander conseil ou de disputer des ordres divins. Uniquement de leur faire part de ces derniers, qu'ils les acceptent ou non. Quoi que soit leur avis sur ces derniers, ils pourraient au moins avoir confiance en notre sincérité. Mais serait-ce suffisant ? Ni Amiel, ni Imamiah, n'avaient la capacité de parler en leur nom. Néanmoins, connaissant l'humanité bien mieux que moi, ils étaient plus à même de juger la viabilité de mon idée.