Ça avait mit un peu de temps à organiser, car il fallait rester discret et ne pas éveiller les soupçons. Ce piège ne pouvait en être un, après tout, que si les rebelles ignoraient que ça en était un et qu'ils mordaient à l'hameçon.

Ma patience avait cela dit payé, puisque l'information était finalement arrivée aux oreilles de ces enfoirés et j'avais eu vent grâce à l'un de mes démons, un incube, qu'une mission allait être menée cette nuit. Nous n'avions pas réussi à infiltrer complètement la rébellion, c'était plus compliqué que ça, surtout avec leur manie d'amoindrir le lien entre les démons de leurs rangs et l'Enfer. Nous n'allions pas laisser de nos propres démons aller jusque là, seulement pour infiltrer leurs rangs. Non, il fallait être un tout petit peu plus subtils. User de démons avec les bons pouvoirs, pour qu'ils ne se rendent pas compte des informations qui fuitaient. Succubes, incubes, pouvoirs psychiques... Nous avions l'embarras du choix pour ce genre de missions, autant en profiter.

Le timing concernant ce piège et sa prise d'effet n'aurait pas pu, être plus parfait. Avec Kobal revenu récemment sur Terre... Je lui avait forcément proposé de se joindre à cette petite sauterie. Après tout, j'étais certain qu'il saurait apprécier mon cadeau à sa juste valeur. Quant aux rebelles qui pensaient venir sauver des humains séquestrés... Ils allaient avoir une sacrée surprise ! Au lieu de cinq ou six démons inférieurs pour garder des otages, ils allaient avoir deux lieutenants pour le prix d'un et une mort certaine.

J'avais ordonné à deux de mes démons de planter le décors sur les deux derniers jours. Ils avaient caché un véhicule plus loin censé être celui de nos gardes démoniaques. Ils avaient parfait le plan, pour conduire les rebelles tout droit jusqu'à la cabane de garde forestier, sans qu'ils ne se doutent de rien. Après tout, tout aurait l'air de coïncider avec les informations qu'ils avaient obtenu. Et je m'étais assuré que les renseignements leur viennent par des indics de confiance après du bouche à oreille totalement orchestré par mes soins. C'était presque trop facile, tant qu'on s'armait de patience.

Le piège était en place, j'avais usé de mon don de téléportation pour nous amener Kobal et moi dans la cabane, ou nous n'avions plus qu'a les attendre, nos auras occultées. Dès qu'ils arriveraient, ils seraient fait comme des rats. Et justement... les voila qui s'approchaient. Même s'ils occultaient leurs auras, nous étions bien plus puissant et pouvions tout de même les percevoir. Trois démons, trois déchus. Comme rapporté par mon incube.

« Trois démons intermédiaires, trois déchus de deuxième ordre. Je t'avais dit qu'on aurait de quoi s'amuser... »
Soufflais-je à Kobal avec un sourire carnassier.

Je m'étais approché de la porte, m'adossant contre le mur profitant de l'obscurité pour me dissimuler davantage. Ils étaient arrivés en silence, mais ça n'avait aucune importance, car nous n'avions pas besoin de les entendre. Dès que le dernier avait franchi la porte, je l'avait refermée derrière eux, mon regard cherchant celui de Kobal :

« J'espère que tu aimes mon cadeau !? »

Je n'avais pas besoin de regarder les rebelles pour savoir qu'ils avaient compris. Compris qu'ils étaient tombés dans un piège et certainement compris, qu'ils ne sortiraient pas d'ici vivants. Cela dit, il restait une chose à déterminer : combien de temps nous allions prendre pour les tuer. Car au-delà de nous amuser, quelques tortures pourraient peut-être délier des langues ou plutôt leurs pensées...

KOBAL & @Liam S. Rowell

Revenir des Enfers, retrouver la civilisation, retrouver ses marques. Les us et coutumes des humains, leurs travers, leurs défauts et leurs maigres qualités. Ce que l'humanité peut être pathétique. Ces “puissants” qui se croient intouchables, sur le toit du monde alors qu'ils ne sont que des fourmis à mon échelle. Revenir sur terre, retrouver l'attraction de la gravité, un sol palpable, un ciel changeant. Un luxe quand on a eu que l'obscurité et les flammes pour seuls paysages pendant ce temps étiré que je dois écourter pour que mon absence auprès de ma clientèle ne soit pas trop longue. Il faut jouer sur deux tableaux, jongler avec les temporalités différentes, avec le déploiement de ma propre puissance. Inutile de préciser que sur terre, je modère, je tempère, refrène ce qui se cache sous mon costume impeccable. Chez moi, chez nous, je reprends vie. L'âme est tellement divine quand elle se fait briser par mes soins, la dureté se transforme en pâte à modeler et la damnation est si exquise à savourer, à contempler. Renforcer nos rangs, briser le carcan de la morale, de la croyance au profit de leur absence et d'une loyauté sans faille que l'on saura récompenser. Avoir la chance, l'honneur de devenir un démon sous le joug sévère et intransigeant de Kobal, l'un des trois Lieutenants de Lucifer, il y a de quoi me baiser les pieds et me servir aveuglément dans nos plans, non?

Le Bloody's Place peut très bien tourner sans moi. Il est rentable depuis toujours et les démons s'y complaisent en y vantant, fêtant leurs contrats passés, leurs tortures récentes, leurs baises multiples sans une once de pudeur. Pourquoi en auraient-ils après tout? Nous sommes parmi les humains pour les détourner de la foi puérile et vaine en un Dieu qui ne leur vient jamais en aide malgré leurs saintes prières, leurs églises qui s'écroulent au fil des ans, leurs fidèles toujours plus vieillissants… Pathétique. Lucifer et nous, par extension, sommes prêts à tout pour en faire de bonnes brebis damnées prêtes à vendre leur âme pour un peu de notoriété, un portable à la mode ou pour obtenir l'amour d'une personne inaccessible… Qu'importe tant qu'au bout du compte, son âme nous revient de droit. Si facilement manipulables qu’ils finissent tous par tomber irrémédiablement entre nos griffes, nous sommes vils, charmeurs, de beaux parleurs nous les démons que voulez-vous. Ce soir, ce n'est pas dans mon bar que je vais officier mais dans la forêt avec mon frère pour tenter d'extirper quelques informations aux crétins qui se prendront dans la toile que tisse Sytry depuis quelque temps déjà. Une cabane de chasseur abandonnée, reculée, parfaite pour y attirer des rebelles bien trop stupides pour ne pas sentir le piège se refermer sur eux. Un peu d'animation et surtout une longue séance de torture en perspective, rien de mieux pour fêter mon retour sur le plan terrestre.

Mon frère nous téléportent à la vieille cabane qui grince sous le vent nocturne. Le silence. J'occulte mon aura, prends place près de la porte Sytry fait de même après avoir analysé la situation. Aucune chance qu'ils s'en sortent, ils ne font clairement pas le poids face à nous. Cette simple pensée étire mes lèvres dans un sourire mauvais, une vraie partie de plaisir se présente à nous. La porte se referme sur eux et ils comprennent immédiatement, mon aura empli la pièce, leur éclate à la face. L'ambiance change du tout au tout, la tension est palpable pas de notre côté mais du leur. Ils échangent des regards, se questionnent silencieusement avant qu'ils ne prennent une posture plus agressive malgré le criant désavantage. Nouveau rictus, je serre les poings et la chaleur enveloppe la pièce. Ravi de ce cadeau cher frère… bien qu'ils soient un peu faibles ces six là. J'aurai pu venir ici en costard que je ne l'aurais même pas froissé. Revenir sur terre et ne pas me glisser dans un costume hors de prix au profit d'un jogging presque une hérésie, une faute de goût quand on connaît mes habitudes vestimentaires. Avec la proposition de Sytry, il me fallait une tenue plus adéquate surtout quand on sait qu'on va finir par se salir d'une manière ou d'une autre. Un des démon se sent pousser des ailes malgré la chaleur qui émane du sol et le poids écrasant de nos auras sur leurs frêles carcasses. Il se rue sur moi en sortant une lame dissimulée dans son dos, à sa ceinture. Je demeure immobile, Sytry ne fait rien non plus, il sait que c'est parfaitement inutile. Le démon grogne, fond sur moi près à me planter le flanc droit mais c'est mon poing au creux de son estomac qui l'arrête nette. Ma main libre le saisit par le cou et le fait quitter le sol sans la moindre difficulté et je l'envoie valser dans un coin de la pièce. Il s'écrase au sol en éclatant une vieille table en bois qui traînait là.

Tu veux qu'on en garde combien? Un ou deux? Je meurs d'envie de passer à l'étape de la torture, celle-ci risque fortement de m'ennuyer à la longue, ils sont si insignifiants… Aucun challenge, aucune difficulté. Sans même attendre la réponse, je fonds de nouveau sur celui qui a volé au travers de la cabane, les autres hésitent encore mais finissent par prendre une décision stupide en se tournant vers Sytry pendant que moi je joue des poings sur le visage du démon encore au sol. Le craquement significatif des os qui se brisent, symphonie morbide qui accélère mon rythme cardiaque. Il y a une époque où ces massacres faisaient partie des préliminaires entre Caym et moi… Un temps révolu à présent. Ce soir, c'est purement et simplement un exutoire, un prolongement de ce que j'ai fait endurer aux âmes en enfer sauf que cette fois sous mes poings, j'ai le sang de mon ennemi et ça, c'est grisant. j'allais une fois de plus abattre mon poing dans la face du démon quand l'un des autres se décide à m'attrapper par le bras pour me retenir. Un grognement m'échappe et en un battement de cils, il finit en torche humaine. Un potentiel candidat à la torture en moins, il nous en reste encore cinq, ça reste jouable.

Cette petite attention et invitation semblait ravir Kobal, ce qui ne me surprenait pas. Après tout, je le connaissait depuis des millénaires. Pourtant, il avait fait une petite remarque qui m'avait tiré un sourire surtout si on considérait le costard italien que je portait, vestige de ma journée de travail :

« Que veux-tu, ils n'ont pas un nombre incalculable de démons et déchus de haut niveau dans leurs rangs... » Ceux-là avaient plus tendance à rester fidèles ou nous rejoindre. Pas tous, certes. Mais j'imaginais aisément qu'ils ne pouvaient pas envoyer leurs meilleurs éléments sur toutes les missions, surtout si leur nombre était réduit.

Fuir n'était pas une option, surtout avec nous en adversaires, cela dit, ils avaient du courage, ou c'était de la stupidité... Je n'étais pas certain rendu là. Car un des démons s'était attaqué à Kobal avec un poignard. Une arme blanche, humaine, qui même s'il l'avait trempée dans de l'aconitum n'aurait eu aucun effet sur nous. Il devait la savoir ! Ou alors, il n'avait pas conscience de notre puissance et c'était presque insultant, car certains avaient été de nos soldats.

Je n'avais pas bougé, presque blasé par leur première attaque, Kobal quant à lui avait attendu, pour tuer l'attaque dans l’œuf une fois le démon à portée de lui. J'avais souris, amusé par le spectacle. Le démon avait volé à travers la cabane, plus vite qu'il n'avait chargé Kobal.

Mon frère m'avait alors demandé mon opinion quant à la quantité de créatures à garder en vie pour les tortures, mais je n'avais pas répondu, pas de suite du moins. Car il avait remis ses mains sur son premier attaquant et semblait trop s'amuser pour que je ne l'interrompe. J'avais d'ailleurs mes propres distractions à gérer, puisque plusieurs de nos victimes s'étaient tournées vers moi, en voyant Kobal se déchainer. Peut-être me croyaient-elles plus doux, moins violent, ou puissant ? Grossière erreur ! J'étais cela dit moins impulsif, le grand frère en quelque sorte. J'attendais, non pas par crainte ou par tactique réelle. Car ils ne faisaient pas le poids pour être une véritable menace. Ma raison était toute autre. C'était uniquement pour mon propre amusement. Car les premiers qui attaqueraient, seraient les premier à y passer. Un moyen comme un autre de choisir lesquels seraient les plus drôle à torturer.

Inconscients de ce détail, ils avaient fini par attaquer. Le premier avait été un démon, puis, les deux déchus et enfin le dernier traitre. Ils s'étaient décidés à attaquer tous en même temps, à quelque chose prêt. C'était en soit une bonne idée, plus logique en tout cas, vu leur infériorité. Mais ça n'allais pas leur servir à grand chose. Avant même qu'ils aient eu le temps d'aller au bout de leur attaque, j'avais pénétré leurs esprits de mon don de manipulation et les avaient forcés à s'arrêter en plein mouvement. Telles des statues, ils étaient crispés, tantôt avec un bras prêt à frapper, tantôt avec un pied ne touchant pas le sol... Je les toisaient, amusé, puis me tournais vers mon frère.

Tous n'étaient pas face à moi, après tout. Un était sous les poings de Kobal et un déchu avait eu la stupidité de penser devoir ou pouvoir aider son camarade. Mais retenir le bras de Kobal lorsqu'il tabassait quelqu'un serait sa dernière et plus grosse erreur. Peu désireux de perdre son temps, Kobal avait embrasé le corps du déchu et très vite, ça n'était plus seulement le corps qui brûlait, mais son âme qui se faisait consumer par le pouvoir de feu de mon frangin. Quelques secondes et le déchu était anéanti, quelques secondes de plus et son corps était entièrement consumé, ne laissant plus aucune trace de son existence.

« Deux, pour répondre à ta question. Parce qu'a ce rythme on risque de manquer de jouets... » Blaguais-je avec un sourire carnassier aux lèvres.

« Quant à qui garder pour les réjouissances... Mhhhh. J'ai envie de croire que ceux qui ont attaqué en premier étaient plus courageux, que stupides. Alors, je vote pour leur offrir une fin un peu plus rapide. Comme tu l'as déjà fait avec ce tas de cendre-ci... » J'avais désigné du regard l'amas gris, seule trace du déchu anéanti. Les deux autres déchus avaient grogné, apparemment froissés que je parle de leur frère comme ça. Mais c'était le maximum qu'ils avaient pu faire. Difficile d'articuler des mots, quand quelqu'un dirige votre esprit après tout.

« Ça nous laisse donc ce déchu et ce démon... » Terminais-je en désignant deux des créatures que je gardait toujours immobiles. Puis, je m'étais approché de l'un, puis de l'autre, j'avais envoyé valser le démon le libérant au passage de mon emprise et le sonnant suffisamment pour le réserver pour plus tard. J'avais alors brisé la nuque du déchu choisi pour les tortures. Le temps que son auto-guérison lui permette de reprendre conscience et de se relever, nous aurions de quoi nous amuser avec les autres.

Et en parlant de s'amuser... J'avais relâché mon emprise sur l'esprit des deux encore immobilisés et le déchu dont le pied ne touchait pas Terre, s'était écroulé au sol. Quant au démon, il n'avait mieux tenu le choc même, si lui, n'était pas suspendu dans les airs.

J'avais tourné dos au démon, restant à l'affut de ses attaques, mais me concentrant sur le déchu pour ce qui allait suivre. Après tout, immobiliser des créatures était aisé avec mes millénaires à parfaire mon don. Mais je préférait être concentré sur un seul, quand il s'agissait de le forcer à révéler ses ailes. Pas parce qu'il offrirait plus de résistance, car même si ce serait le cas, ses barrières ne seraient pas pour autant suffisantes. Non, c'était plus pour le coté poétique des choses. Après tout, tuer, torturer... c'était un art pour moi.

Le déchu n'avait pas eu le temps de se redresser pleinement, que mon emprise sur lui avait reprit et un par un les murs qu'il tentait de dresser dans son esprit cédaient. Jusqu'à ce qu'après quelques secondes, il révèle ses ailes noircies de déchu. Je m'étais alors approché de lui, sous les yeux effrayés des deux démons qui peinaient à se relever, le dernier déchu qu'on torturerais, quant à lui, était encore en train de guérir de sa blessure normalement mortelle pour un humain. J'avais, alors, mis toutes mes forces dans les gestes qui avaient suivit. Arrachant de son dos, une, puis l'autre aile, dans des déchirements sonores et des cris d'agonies, jouissifs. J'aurais presque pu voir la lumière quitter les yeux du déchu, alors que ce qu'il restait de sa grâce se détruisait en même temps que je lui arrachais ses ailes.

« Au suivant... » Soufflais-je, laissant un sourire impatient se dessiner sur mes lèvres...