Love ? What is that ?

Le temps était clair, ensoleillé et comme la plupart du temps, je traînais dehors, savourant dans le fond cette liberté de ne plus être enfermée et pouvoir aller où je voulais et faire ce qu’il me plaisait, dans la limite du possible. Sinon je tuerais chaque humain qui croiserait ma route. Malheureusement ce n’était pas aussi simple et je passais la plupart de mes journées à vagabonder et faire du sport… Beaucoup de sport même pour pouvoir réussir à contrôler mes émotions et ne pas exploser sous mes pulsions meurtrières. Et elles étaient nombreuses... Un rien pouvait les déclencher. J’avais seulement enfilé un simple jogging ample avec un débardeur et une petite veste légère par dessus, le tout en noir. Les couleurs ce n’étaient pas vraiment pour moi, je préférais la simplicité et surtout la discrétion.

Un soupir de frustration avait passé mes lèvres après avoir couru pendant plusieurs heures dans le parc, essayant de reproduire ce qu’il s’était passé il y a peu avec mon nouveau pouvoir… Mais aujourd’hui c’était sans succès, je n’avais réussi que brièvement à aller beaucoup plus vite, quelques secondes seulement mais qui m’avais surprise et j’avais seulement faillis me prendre un arbre. Rien de glorieux, au contraire… Je préférais oublier cette mésaventure humiliante qui avait un goût amer. Pourtant les mots de Sytry résonnaient toujours dans ma tête… « Ne pas le décevoir... » Je devais progresser. Je devais mieux faire. Qu’est-ce qu’il penserait si j’aurais un nouveau pouvoir que je ne serais même capable d’utiliser correctement et quand je le veux ? Je passerais pour une incompétente qui n’arrive pas à apprendre vite… Alors qu’il m’avait dit d’apprendre, et vite. Je devais faire mieux.

Le parc commençait à se remplir un peu plus maintenant qu’on arrivait à la fin de matinée. Ce n’était plus le bon moment pour mes exercices et je me laissais tomber sur le banc le plus proche, masquant au mieux ma frustration en donnant un petit coup de pied dans un caillou, à défaut d’un humain même s’il y en avait autour. Malheureusement aucun ne se le prenait. Quand ce n’était pas le bon jour, ça ne l’était vraiment pas, jusqu’à la fin. Et ça… C’était sans compter sur les cris d’enfants qui résonnaient soudain pas loin de moi alors que je voyais un môme courir dans l’herbe poursuivi par l’autre un peu plus grand. Un nouveau soupir de frustration passait mes lèvres, ils ne criaient pas, ils riaient en faite, ou les deux à la fois ? Bref ça n’avait pas forcément d’importance, ils faisaient trop de bruit. Beaucoup trop. Et les parents qui les laissaient faire au lieu de les corriger, peut-être trop occupés pour installer leurs affaires dans l’herbe. Évidemment c’était ici qu’ils veulaient se mettre avec leurs deux cauchemars miniatures. J’aurais du être patiente et attendre un peu avant de shooter dans le caillou, j’aurais peut-être pu avoir l’un des deux. Mon instant de tranquillité pour reprendre mes forces venait d’être gâché et j’allais me relever pour partir quand les cris se changeaient en pleurs. Ca je reconnaissais. Un léger sourire apparaissait finalement sur le coin de mes lèvres malgré moi, il l’avait mérité. Je reportais mon attention sur le gamin par terre qui n’avait rien mais se mettait soudain à hurler quand même. Super… Il pouvait pas tomber en silence ? Et j’étais innocente pour le coup. Il était tombé tout seul, même si l’idée de l’y aider avec mon don d’illusion m’avait effleuré l’esprit. La mère se levait enfin mais au lieu de le frapper pour ses pleurs inutiles - et bruyant- elle…. Le prenait dans ses bras ? Je restais légèrement abasourdie, assise à les observer sans réellement comprendre… Pourquoi est-ce qu’ils se comportaient tous de manière aussi étrange ? Et parlaient d’ailleurs de choses toute aussi étrange d’après mes précédentes rencontres… Mais au moins elle avait réussi à calmer son gone, c’était déjà ça.

Pourtant mon incompréhension en plus de ma frustration laissait rapidement place à quelque chose de plus fort… Même si je ne savais pas quoi.. Et cette fois mes pulsions meurtrières resurgissaient sur cette famille qui souriait trop, riait trop et .. était trop affectueux ? Je n’en savais rien mais je voulais juste voir leurs sourires disparaître de leurs visages pour ne plus jamais y revenir… Des pensées sombres qui avait accaparé mon esprit et je n’avais pas fais attention tout de suite à l’homme qui approchait… Je finissais malgré tout par le remarquer et posais un regard froid sur lui pour l’inciter à me laisser tranquille comme j’en avais l’habitude. Et ça marchait plutôt bien, la plupart du temps en tout cas. Ca pouvait aussi m’attirer des ennuis dans les autres cas, mais je n’étais pas contre non plus. Ça faisait au moins un peu d’action.

LHEINA & EZECHIEL

La traque d'un déchu m'avait mené ici. Dans un parc, rempli d'humains. La traitresse était toujours là, participant à... j'ignorais ce qu'elle et ces humains faisaient pour être exact. Ils se tortionnaient tous dans différentes positions, suivant les indications de l'homme face à eux. Une activité de groupe humaine semblait-il. Je devais donc faire preuve de patience, car il était proscrit de l'attaquer maintenant. Je pouvais sentir son aura, mais elle non. Je ne l'avais jamais croisé avant en mission, elle n'avait donc aucune idée de ce à quoi ressemblait mon enveloppe charnelle sur Terre. Que de bonnes choses, puisque je n'avait aucun endroit ou me cacher à proximité, une proximité suffisante pour continuer de percevoir son aura et la suivre, du moins.

Comme cette activité semblait en voie de durer, j'avais cherché du regard quelque chose à faire, pour me fondre dans le décors. J'avisais plusieurs humains, tentant de savoir lequel copier pour paraitre comme eux. Mais très peu étaient seuls et ceux qui l'étaient avaient d'autres artifices que je me possédait pas. Puis, mon regard s'était posé sur une humaine au milieu de tous. Elle semblait en observer d'autres et... comme si elle se trouvait dans la même position que moi. Elle les regardaient avec tant d'insistance que je doutais qu'elle soit en mesure de les imiter. C'était cela qu'elle cherchait, non ? Ou étais-ce seulement moi ? Oui, probablement. J'avais besoin de les imiter, car je n'étais pas l'un d'eux. Alors... que cherchais-t-elle ? Avait-elle besoin d'aide ? Soudain, lui parler semblait la solution parfaite. Pour la comprendre, pour être plus discret tout en continuant de veiller à percevoir l'aura de la déchue...

« Bonjour. » Fis-je m'approchant finalement de l'humaine.

« Je m'appelle, Noah. » J'avais utilisé le nom humain que je donnais chaque fois que je voulais passer pour l'un d'eux. J'ignorais si cela était nécessaire avec cette jeune femme, mais je ne pouvais décemment pas me présenter comme Ezechiel, sans le savoir.

« Je passait seulement par là et... Vous aviez l'air... Perdue ? » J'ignorais si tel était le cas. Ou si j'avais mal jugé et qu'elle était triste, voir autre chose. Mais lui demander semblait la seule bonne chose à faire.

« Je suis navré si c'est déplacé. Je voulais juste m'assurer que vous alliez bien. Est-ce... ça va ? » J'avais tenté de formuler cela le plus humainement possible. Même si je manquais de discernement pour savoir ce qui l'était vraiment. Peut-être paraitrais-je étrange, pour le but recherché.

Love ? What is that ?

Si d’habitude j’avais le résultat désiré, dans un cas comme dans l’autre, cette fois c’était différent. Il ignorait le regard froid que je lui avais lancé et se rapprochait encore un peu plus avant de me saluer et se présenter… Noah… A quel moment dans mon comportement il avait comprit ça comme-ci j’avais envie de le connaître ? Je le dévisageais toujours aussi froidement et répondais :

▬ Tant mieux pour toi, Noah. 

Je ne le saluais pas et ne lui donnais pas non plus mon prénom. Est-ce qu’il essayait de vouloir me draguer alors qu’il aurait pu avoir l’âge d’être mon père sérieusement ? Enfin si j’en aurais eu un. Pourquoi il venait me parler ? A moi ? Le parc n’était pas assez grand ? Il n’y avait pas assez de monde avec qui il aurait pu parler ? Comme cette famille qui méritait de mourir juste pour que je n’ai plus jamais à entendre ce son étrange… Des rires d’enfants. J’étais agacée, énervée… Jalouse ? Non… Ou peut-être bien oui... Bref ça n’était pas important. Il ne tombait pas au bout moment je n’avais aucune émotion positive qui pouvait laisser une chance à cet homme d’avoir le droit à mon petit numéro en faisant semblant d’être gentille… Je n’en avais pas envie et je lui soufflais alors :

▬ Qu’est-ce que tu veux ? 

Il voulait savoir si je n’étais pas perdue ? Ok, il devait se moquer de moi c’est certain. J’étais assise sur un banc, est-ce que j’avais réellement l’air d’être perdue ? Sa question m’arrachait un léger sourire… Mais pas à un gentil, plutôt le genre sarcastique alors que je levais la main pour lui désigner le chemin qui continuait sur la droite avant de lui répondre :

▬ On est dans Griffith Parc, si tu continues sur ce chemin là, tu trouveras la sortie d’ici vingt minutes en marchant tranquillement…. J’ai l’air perdue à ton avis ? Tes méthodes de drague sont nulles, mais vraiment. Et t’es trop vieux, essayes avec quelqu’un de ton âge, t’auras plus de chance. 

Je pouvais difficilement faire plus clair que ça… Il s’excusait mais restait tout en me disant qu’il voulait s’assurer que tout allait bien, puis me demandait si ça allais… Un soupir passait finalement mes lèvres tandis que je soufflais tout en détournant mon regard de lui pour le poser sur les deux gamins qui riaient ensemble :

▬ Ca irait mieux si quelqu’un pourrait les faire taire… Ou mieux… Disparaître. Ils sont trop bruyants et mériteraient d’être éduqués correctement avec ordre et discipline… 

Ok… J’avais besoin de me calmer avant de dire une connerie à cet étranger… J'étais bien trop sur les nerfs et à deux doigts d'exploser à cause ... d'une famille heureuse... Je relevais le regard sur lui, souriant faussement tout en soufflant pour rattraper mon impulsivité :

▬ Je plaisante, évidemment……….. 

Ou pas.

▬ C’est… Une charmante famille... 

Qui donne la nausée et m’écœure.

▬ Pourquoi ça t’intéresserais comment je vais ? Ca se voit, je vais bien, je ne suis pas malade et je n’ai aucune blessure. 

Je le dévisageais et finissais par lui souffler :

▬ C’est plutôt toi qui a l’air perdu… Tu attends quelqu’un ? 

Un petit tour que j'avais appris quand quelque chose me dérangeait ou une discussion plus spécifiquement, il fallait juste détourner le sujet sur l'autre personne. Les humains aimaient qu'on s'intéresse à eux, ils aimaient parler d'eux, se confier ou se vanter. Au moins ça détournera l'attention de moi et de la bombe à retardement qui s'accumulait à l'intérieur.

LHEINA & EZECHIEL

J'ignorais ce qui avait provoqué la réponse de la jeune humaine. Peut-être que ma venue était réellement déplacée, comme je l'avait craint. Ou peut-être que j'avais mal interprété le problème ? Ou le sentiment derrière son regard étrange ? Quoi qu'il en soit, elle avait été sèche et peu encline à converser. Quoi qu'elle parlais. Mais je n'étais pas certaine de comprendre pourquoi elle disait ce qu'elle disait ou si c'était vraiment à moi qu'elle s'adressait quand elle décrivait les lieux.

« Je ne... » Je ne parlais vraisemblablement pas de ce genre d’égarement. Il paraissait évident qu'elle savait ou elle était. Tout comme c'était effectivement à moi qu'elle répondait et a ma question. Bien que la vraie question, à savoir comment elle allait, restait pour le moment sans réponse. Mais tout ça me paraissait inutile à répéter. Croyait-elle vraiment que je parlais de cela ? Ou était-ce lié à ce qu'elle avait ajouté derrière ?

« Je n'essayais pas de vous... draguer. » Soulignais-je, n'étant pas exactement sûr de ce que voulais dire ce mot. En soit, j'en connaissait le sens, mais c'était toujours plus difficile que cela. N'est-ce pas ?

Elle avait ensuite répondu à ma question, mais de manière... particulière. Elle parlait d'autres humains, des enfants, en des termes plutôt brutaux. Et je tiquais. Il ne m'appartenais pas de la juger et je ne le faisais pas. Cependant, je devais bien admettre que ça n'était pas la réponse que j'avais pensé recevoir en lui demandant comment elle allait. Elle avait fini par rectifier ses paroles, me disant plaisanter.

Une chose que les humains faisaient beaucoup. De bien des manières. Trop. Tant, que je n'était pas capable de les suivre ou les repérer la plupart du temps. Alors, je la croyais sur parole. Pour les humains, c'était probablement une forme d'humour.

« En effet, vous avez l'air de bien aller, physiquement, du moins. Mais vous aviez l'air... absente. Comme si quelque chose vous affectait. »

Je cherchais mes mots, essayant de trouver les plus adaptés à la situation, afin d'éviter de déclencher une réaction brutale.

« Quant à savoir pourquoi ça m'intéresse... Disons qu'a défaut de m'intéresser. Je dirais plutôt que je n'aime pas fermer l’œil si je crois voir quelqu'un de triste, ou de... peut importe ce que j'ai cru voir chez vous. Je ne suis même pas certain de ce que c'était. »

Je me forçait à un sourire contrit, puis ajoutais :

« Je ne suis pas perdu, non. Je n'attends personne, non plus. J'avais seulement envie de me promener... » Je ne pouvais pas répondre de manière honnête. Cela aurait amené des questions qui étaient trop compliquées et dangereuses.

« Je suis navré. Je ne voulais pas vous déranger ou vous... froisser. Si vous voulez que je vous laissent, dites-le et je partirais. Mais si... si j'ai vu juste et que vous souhaitez parler. Je sais être une oreille attentive. »

Le choix lui appartenait, c'était comme cela que ça devrait être, toujours. Qu'elle veuille ou non, ce serait sa décision. Quant à moi, s'il le fallait, je trouverais une autre façon de patienter sans éveiller les soupçons de la déchue.

Love ? What is that ?

Froide et agressive ? Je l’avais été, pourtant il restait là, un air surpris sur le visage comme s’il ne comprenait pas ma réaction… Apparemment il n’essayait pas de me draguer. Si ce n’était pas le cas, il était plutôt étrange à venir m’aborder comme ça, sans aucune vraie raison. Personne ne se souciait réellement des autres et demandait encore moins s’il allait bien… J’avais faillis exploser, mais je m’étais finalement reprise, espérant que mon excuse de l’humour passe. Et apparemment c’était le cas… Tant mieux… Je n’étais pas forcément douée avec tout ça, mais je m’en sortais pas si mal finalement… Je devais me calmer et me reprendre… Il me confirmait que j’avais l’air d’aller bien, du moins physiquement, mais qu’il avait remarqué que j’avais l’air absente comme-ci quelque chose m’affectait… Je dévisageais quelques instants les deux gamins bruyants et soupirait :

▬ Non… Je vais bien. J’étais seulement dans mes pensées. 

Il n’aimait pas fermer les yeux quand il pensait voir quelqu’un de…. Triste ? Moi ? Je n’avais pas le droit de l’être, je n’avais aucune raison de l’être… Je devais être redevable pour l’éducation que j’avais eu. Si j’avais commencé à me calmer jusqu’à présent, mon regard se reposait à nouveau sur lui avec agressivité dès l’instant où il avait prononcé ce mot.

▬ Je ne suis pas faible… Pourquoi tu penses quelque chose comme ça ? Tu as mal vu c’est certain… Je ne suis pas triste, je suis seulement… Agacée… 

J’essayais ensuite de reporter la conversation sur lui en lui demandant ce qu’il faisait ici, mais sa réponse restait vague, il venait juste se balader par ici, il n’attendait personne et n’était pas perdu… Je le dévisageais quelques instants, ne pouvant me retenir de le trouver bizarre… Mais je n’étais pas forcément la mieux placée pour juger alors que j’avais envie d’étriper une famille entière pour la seule raison qu’ils rigolent… Il rajoutait ensuite qu’il n’avait pas voulu me déranger ou me froisser et qu’il partirait si je le voulais. Puis il précisait qu’il pouvait être d’une oreille attentive si je le désirais… Un nouveau soupir passait mes lèvres, pourquoi tout le monde me proposait ça ? J’avais tant que ça cet air … Absent qui les interpellaient à ce point-là ? Faire ce petit jeu une fois, c’était amusant, mais pas deux fois. Je n’étais pas d’humeur à être concentrée dans ce petit jeu d’actrice.

▬ Je n’ai pas la moindre envie de parler… 

Essayer d’être plus diplomate, ce n’était vraiment pas mon fort.. Et je finissais par rajouter :

▬ Mais si tu as envie de parler, je peux t’écouter… 

Je regardais de nouveau les gamins qui se chamaillaient à présent pour un bout de gâteau, l’un d’eux aurait eu un smartie de plus dessus… Pendant que les parents semblaient imperturbables malgré les couinements de leurs mômes… C’était insupportable et ça n’avait aucun sens. Pourquoi ils ne mangeaient pas chez eux ? Ca faisait déjà cinq minutes que la femme se battait avec une abeille pour la faire partir et que ses deux chieurs d’enfants essayaient de faire perdre l’audition à toutes les personnes présentes dans un rayon d’une centaine de mètres au moins. Je lui demandais alors :

▬ A ton avis, pourquoi ils font ça ? 

LHEINA & EZECHIEL

Elle disait aller bien et n'avoir qu'été préoccupée par ses pensées. Je ne pouvais que la croire sur parole, ou du moins, ne pas insister. Si elle disait aller bien, si elle allait bien... Alors elle refusait mon aide. Son choix était fait et il lui appartenait.

Je ne pouvais pas parfaitement comprendre sa réaction, quant à mon interruption. Mais, puisqu'elle n'avait pas besoin d'aide, ou n'en voulait pas... ma présence était une nuisance. Cela, je pouvais l'entendre. Ce que je ne saisissais pas, c'était lorsqu'elle parlait de faiblesse. Je connaissais le mot, son sens, mais... je peinait à voir en quoi il était adapté ici. Je n'avait perçu aucune forme de faiblesse, ou alors... n'en étais-je pas capable ? Peut-être bien. Les humains restaient le plus souvent, une énigme, pour moi.

« Je suis désolé. J'ai... mal interprété la situation. Je ne voulais pas vous déranger. »

Lui présenter mes excuses semblait être la chose à faire. Cependant, après qu'elle ai dit ne pas vouloir parler... Partir semblait être la suivante. Elle ajoutais quelques mots, rectifiant quelque chose que je n'avais pas compris. Ce n'était pas qu'elle refusait de parler avec moi. Elle refusait de parler elle, mais souhaitais... m'écouter ?

J'ignorais si c'était pour se montrer polie ou pour une autre raison, mais je n'avais rien à dire. Non pas parce que je refusait de lui parler. Mais qu'aurais-je pu lui confier ? Aurait-il fallu que j'invente des mensonges ? Si mentir n'était pas une faute pour un ange, ça n'était pas non plus une seconde nature. Je pouvais mentir quand cela s'avérait nécessaire, pour protéger l'humain ignorant, innocent. Mais trouver un sujet à aborder pour parler seul... C'était bien trop compliqué pour moi.

Heureusement, alors que je cherchais, silencieux, quoi répondre à sa proposition. Elle avait repris la parole et posé une question. Elle disait ne pas vouloir parler, mais parlait, m'interrogeais. J'étais perdu quant à la marche à suivre. Alors je décidais de faire une chose à la fois. Une requête à la fois. Elle m'avait dit ne pas vouloir parler, j'avais présenté des excuses. Elle me posait une question... j'allais tenter d'y répondre.

« Pourquoi font-ils quoi ? » Ça n'était pas une réponse, mais une autre question. Cependant, je n'étais pas certain de ce que voulais dire sa question.

« Parlez-vous des parents ? Des enfants ? De la famille au complet ? » J'ignorais si elle parlait également d'actions spécifiques, ou d'un ensemble de choses. De leur repas sur cette parcelle d'herbe, par exemple.

« Voulez-vous dire... pourquoi mangent-ils, ici ? »

Love ? What is that ?

Il s’excusait, à nouveau, pour avoir mal interprété la situation. Encore des excuses… Il devait en faire moins, Sytry n’apprécierait pas, alors je n’appréciais plus particulièrement ça non plus. J’étais froide avec lui et il pouvait aisément le sentir, pourtant il restait très calme et …. Doux ? Pas le genre de réactions habituels, mais après tout, je ne m’y connaissais pas encore assez réellement pour toujours comprendre comment les humains fonctionnaient. Certains étaient peut-être juste vraiment né pour être des victimes, vulnérables avec leurs bontés étouffantes. Je lui disais ne pas vouloir parler, mais comme pour tenter de me montrer malgré tout aimable, je lui proposais de l’écouter s’il avait besoin. Avec de la chance, j’entendrais peut-être moins ces gamins qui me perturbaient. Malheureusement niveau conversation et sociabilité, je crois que je venais enfin de trouver pire que moi… Il ne disait rien. Je finissais alors par lui souffler une question simple… Du moins je croyais qu’elle l’était. Apparemment pas tant que ça. *Et merde* Maintenant il allait me trouver bizarre alors que je n’avais pas le droit à une réponse… Mais une avalanche de questions qui me tombait soudain dessus en retour. Je relevais le regard vers lui, ne pouvant retenir un léger sourire malgré moi tout en lui soufflant :

▬ Wow… Tu réponds toujours à une question par une centaine d’autres ? 

Je reportais mon regard sur la famille et lui demandais ensuite :

▬ Pourquoi ma question te surprends tant que ça ?

Ok si on continuait tout les deux à se répondre par des questions, ça risquait de devenir long avant d’obtenir une réponse… Il y avait apparemment quelque chose qui n’allait pas avec ma demande et je devais trouver une meilleure formulation pour avoir l’air… Plus normale. Parce que là, je l’avais perdu apparemment.

▬Je me demandais seulement pourquoi une famille viendrait manger ici… Et pourquoi les enfants s’agitent autant, sans réprimandes… Les parents sourient juste…

Un dernier point tout aussi incompréhensible que le reste… Les parents servaient à quoi s’ils ne faisaient rien pour corriger leurs enfants et qu’ils les laissaient s’amuser ? Les miens auraient été pareil si j’aurais grandi avec eux ? Je ne devais pas penser à ça. Je serais devenue chouineuse et bruyante sans l’aide d’Haakon… Je ne devais pas ressentir de la jalousie, c’était stupide, je devais être redevable pour avoir été endurcie et être forte à présent. Je me rendais alors compte que ce que je disais pouvais avoir l’air étrange et je tentais alors de me rattraper en rajoutant :

▬ Les enfants pourraient se faire mal, à bouger comme ça, de partout……

Comme-ci j’étais inquiète pour ces morveux…

LHEINA & EZECHIEL

Je n'étais pas le mieux placé pour comprendre les agissements ou les paroles humaines. Voila pourquoi j'avais interrogé la jeune femme, cherchant à comprendre sa question au mieux. Si je devais réfléchir à une réponse, cela me semblait nécessaire. Pourtant, elle semblait ne pas pensé comme moi et m'avait... reproché mes questions ? Je n'étais pas certain qu'il s'agissait d'un reproche, néanmoins, je prenais note au cas ou et allait m'efforcer de ne pas lui poser dans de questions, en réponse aux siennes. Je ne souhaitait pas la déranger ou me montrer déplaisant en faisant autrement que ce à quoi elle était habituée.

« Je cherchais seulement à comprendre le sens de votre question. Ce n'était donc pas tant de la surprise, que de l'incompréhension. Mais, je vous présente mes excuses. J'ai effectivement... posé de nombreuses questions et n'ai pas encore répondu réellement à la votre. »

Elle disait vrai, tout comme moi, d'ailleurs. Cela dit, elle était humaine et mon devoir impliquait que je me montrer patient et à l'écoute de ses besoins. Nous étions leurs protecteurs, là pour les aider, pas l'inverse. Aussi, percevant toujours l'aura de la déchue plus loin, j'avais gardé le cours de notre conversation et répondu :

« J'imagine... Qu'ils viennent profiter de la nature et de ce soleil. » Soulevais-je en jetant un regard au ciel bleu et presque sans nuages. Puis, je posait mon regard sur les enfants, qu'elle disait agités et m'apprêtais à ajouter quelques mots, quand elle me devança. Elle expliquait alors qu'elle avait peur qu'ils se blessent et je la toisais, compréhensif :

« Ils ne semblent pas en grand danger. Ils sont au mieux... animés. J'imagine que leurs parents apprécient de les voir profiter de l'environnement. » Je ne pouvais pas répondre avec certitude, car tout n'était que supposition pour moi quand il s'agissait de coutumes humaines du genre. Mais ma réponse me satisfaisait, au moins en partie.

« Il y a peu de choses capables de les blessées aux alentours. Si ce n'est peut-être les arbres, les cailloux... Alors, ils les laissent... S'amuser ? »

La fin de ma phrase sonnait comme une question, non pas parce que je lui demandais son avis, mais parce que je n'étais toujours pas certain de ce que j'avançais. Il m'était difficile d’appréhender les humains le plus souvent, mais c'était encore pire quand il s'agissait de leurs progénitures. Bien entendu, il y avait un danger réel et plus pressant que les arbres. La déchue qui s'étirait plus loin dans son groupe. Mais ni les parents, ni cette jeune femme ne pouvaient en avoir conscience. Et c'était un danger sur lequel je veillerais, ça n'était donc pas le fardeau de ce couple, de ces enfants, ou de cette jeune femme.

« Ils semblent apprécier voir leurs enfants rire et... jouer. Je pense que c'est plus simple que de s'inquiéter de tout en tout temps. » Et surtout, nous étions là pour éviter qu'ils aient à le faire.

Love ? What is that ?

Apparemment il cherchait seulement à comprendre le sens de ma question… Je devais paraître étrange, mais il l’était aussi avec sa réponse en plus de s’excuser, encore…. Ok je pouvais comprendre l’agacement de Sytry maintenant… Un léger soupir passait mes lèvres même si je prenais sur moi pour ne rien dire à part :

▬ Effectivement oui... 

Il avait une manière de parler peu habituel, mais rien de vraiment anormal, il faisait sûrement parti de ce que les jeunes du quartier appelaient « les bourges ». Il reprenait ensuite pour me dire qu’ils venaient sûrement pour profiter de la nature et du soleil… Ce qui n’avait guère plus de sens… Ils ne pouvaient pas profiter s’ils emmenaient leurs gamins avec eux au lieu de partir sans. Sans compter la perte de temps pour tout préparer et tout emmener ensuite à l’extérieur juste pour profiter de la nature… Comme la guêpe que le couple essayait de chasser mais qui revenait toujours à la charge… Ou le gobelet en plastique qui passait son temps à se renverser... Yeap, super plaisant comme endroit pour manger. Je faisais comme-ci je m’inquiétais pour les gamins agités alors que j’avais juste envie qu’ils disparaissent, les voir ainsi m’agaçait. Pour l’homme, au contraire, les parents appréciaient qu’ils soient ainsi et qu’il n’y avait pas réel danger… Hormis peut-être moi, mais je gardais ce détails. Un accident de voiture en croyant voir le feu vert au lieu de rouge en repartant du parc, ça pouvait vite arriver…

▬ Ils sont plus qu’animés… Ils crient et rient… Ils n’apprécient rien, ils sont seulement indisciplinés... 

Rien d’appréciable à ça. Ils gâchaient le silence de la nature, même les oiseaux avaient fuit plus loin. Enfin apparemment j’avais tord ce n’était pas de l’indiscipline, c’était…. De l’amusement.. ? Je fronçais les sourcils, me retenant de demander à quoi ils pouvaient bien jouer pour s’amuser. Clairement, ce n’était pas les mêmes genre de jeux que ce que j’avais avec Haakon. Il n’était pas question de trouver le bon organe et l’enlever ou de réussir à faire un nouveau record pour faire durer le plus longtemps possible l’agonie d’une victime pour avoir le droit à un mac’do ou des gâteaux en cas de réussite. Là c’était différent, et jusqu’à maintenant je n’avais pas vraiment fait attention à ça, évitant au mieux les endroits où ils y avaient des gamins pour échapper à leurs cris incessants… Mais crier était apparemment un jeu pour eux, c’était de l’amusement… Ou j’avais loupé quelque chose. Je préférais ne rien dire et le laissait poursuivre alors qu’il finissait en disant que les parents étaient simplement content de voir leurs enfants rire et jouer, que c’était plus simple que d’être tout le temps inquiets.

▬ Je suppose que c’est plus simple oui... 

Pourtant je n’aimais pas voir ça…. Leurs sourires et leurs rires donnaient la nausée. Jamais Haakon n’aurait apprécier ou même tolérer que je m’agite dans les sens en poussant des cris comme eux le faisaient…

▬ Mais leurs parents devraient tout de même les remettre à l’ordre pour qu’ils se calment. Leurs rôles c’est de préparer leurs enfants pour le futur qui les attendent, pas de laisser faire n’importe quoi parce que c’est plus simple, non ? 

Et je voyais aucune utilité à ce qu’ils les laissent continuer de s’agiter comme ça, ce n’était rien d’autre qu’irritant. Je devais sûrement paraître bizarre aux yeux de cet inconnu à parler comme ça, je me forçais à un sourire tout en soufflant :

▬ Désolé, j’ai grandi avec des bonnes sœurs, elles étaient bien plus stricte que ça. 

Pourquoi je sortais une connerie comme ça ? Hmm.. Sûrement à cause du film "la nonne" que j'avais vu la veille et l'ambiance glauque qui régnait dans le couvent du film. Enfin... J’aurais pu trouver mieux comme mensonge, mais ça le faisait aussi après tout, non ?

LHEINA & EZECHIEL

Indisciplinés ? C'était le mot qu'elle avait utilisé et qui selon elle résumait l'attitude des enfants. Je pesait la signification du mot, l'attitude de leurs parents, mais rien ne semblait corroborer ses dires. Crier, rire, jouer... J'avais beau ne pas être humain, cela semblait anodin. Ils ne criaient pas d'une manière qui m'aurait laisser croire qu'ils étaient en danger, ou trop fort. Ils avaient des rires cristallins, enfantins qui semblaient faire sourire et satisfaire les humains autour. Tout, à part ce que disait cette jeune femme semblait laisser penser qu'ils n'étaient pas indisciplinés.

« Je ne sais pas... » Je ne savais pas quoi lui répondre. Personne d'autre n'avait l'air de les trouver indisciplinés. Les parents les premiers, puis pour ce qui était des humains aux alentours, a part nous, personne ne semblait réellement prêter attention à cette famille. J'avais alors supposé que c'était plus simple de les laisser jouer que de s'inquiéter de tout et rien. D'autant plus que, même si je ne le disait pas, je veillais sur tous ces humains par ma simple présence. La déchue semblait toujours prise dans son activité, ignorant tout de ma présence. Mais le danger qu'elle pouvait représenter ne serait pas, car j'allais veiller à ce qu'elle s'éloigne avant d'attaquer. Elle avait validé mes propos, s'accordant à dire que c'était probablement plus simple, même si cela ne semblait pas positif pour elle. J'aurais pourtant aimer pouvoir simplifier la vie des humains et leur épargner les douleurs et dangers de cette apocalypse. La simplicité parfois, avait du bon. Spécialement pour des créatures aussi éphémères.

« Peut-être. Je... » Je ne pouvais pas dire que je n'étais pas humain et ne pouvais pas pleinement comprendre, ou même que ce qui suivrait n'était que suppositions. Mais je pouvais dire autre chose : « Je n'ai pas d'enfants et ne peux pas parler au nom des parents. Ceux-ci, ou tous. Mais... peut-être que ça n'est pas leur seul rôle ? Il leur faut les préparer à l'avenir, oui. Mais également les... aimer. Les laisser vivre leur vie, apprendre par eux même... Décider, par eux même... » C'était peut-être faux, d'un point de vue humain, je n'en était pas certain. Toujours était-il que d'un point de vue d'ange, considérant le libre arbitre et les choses que je savais sur eux... cela me paraissait logique.

« Je vois... Vous... Vos parents ne sont plus de ce monde ? » J'ignorais si poser cette question était déplacé. Mais puisqu'elle avait laissé entendre avoir été élevée par d'autres, des religieuses... La logique voulait que je demande. Quant aux méthodes strictes pour élever des enfants... Je m'y connaissais. Il s'agissait d'Anges et non d'enfants, mais nous étions tous les créatures de Dieu et il était notre père. Ses règles étaient strictes, mais pour de bonnes raisons, quoi que j'ignorais si cela ressemblait aux règles qu'elle avait eu de part sa propre éducation.

« Être stricte à ses avantages. Je connais la rigueur, le calme et l'ordre. Mais, je suppose que d'autres façons d'éduquer existent et que toutes ont leurs avantages et leurs inconvénients. » Bien entendu pour nous, la fermeté des lois n'était pas là par hasard et il était hors de question de le changer. Mais pour des humains, autant de fermeté quand ils étaient si différents de nous... cela paraissait presque injuste. Leurs erreurs s'ils en commettaient, n'étaient pas aussi conséquentes pour les plans que les nôtres. Ainsi, crier et jouer... ne semblait pas être des erreurs suffisamment graves pour qu'on empêche ses enfants de le faire.

« Le premier avantage que je constate, à cette méthode... » Ajoutais-je en avisant les enfants dont nous parlions : « Est qu'ils semblent heureux. »

Love ? What is that ?

Les propos de l’homme semblait étrange, ou c’était moi qui l’était… Ce qu’il disait n’avait pas le moindre sens à mes yeux. Apparemment le rôle des parents n’étaient pas simplement de les éduquer…. Mais de les affaiblir volontairement .. ? L’amour… Une faiblesse à ne jamais avoir, une chose écœurante, mais surtout interdite. Seul les faibles aimaient, les forts ne se laissaient pas tromper par ça, il n’avait pas leurs jugements faussés par les sentiments. Je pouvais remercier Haakon de m’avoir sauvé de ça, de m’avoir rendu forte au lieu de faible, comme ces humains avaient l’habitude de faire avec leurs progénitures… Et c’était quelque chose de normal à en juger par le comportement de l’homme qui parlait calmement tout en rajoutant que les enfants devaient vivre leurs vies, apprendre et décider par eux-même… Si je comprenais bien, les parents humains ne servaient donc à rien… Mise à part affaiblir leurs enfants. Je fronçais légèrement les sourcils… Il fallait tuer les parents pour sauver les enfants de la médiocrité qui les attendaient, pour les endurcir. C’était la seule chose que je pouvais faire pour les aider. Je ne pouvais pas dire ce que je pensais vraiment… Je me forçais à un léger sourire tout en lui répondant finalement :

▬ Je vois oui… Je suppose que c’est le mieux à faire pour eux.

Je ne parlais pas réellement de ce qu’il venait de dire en réalité, mais plutôt du projet que j’avais en tête à l’encontre des parents. Pourtant je pouvais aisément donner l’impression de donner raison à cet inconnu sur la manière dont les parents éduquaient leurs enfants. Il me demandait alors si mes parents n’étaient plus de ce monde et j’acquiesçais d’un signe de tête en répondant d’une voix neutre qui ne laissait percevoir aucune tristesse ou mélancolie :

▬ Non. Ils sont morts il y a longtemps.

Heureusement… Mais je gardais ce dernier mot pour moi. Mieux valait éviter de dire ce genre de choses à voix haute. Il avait l’air d’avoir été éduqué comme moi avec les paroles qu’il avait ensuite en faisant allusion à la rigueur, le calme et l’ordre… Des choses qui avaient bien plus de sens que ce qu’il racontait juste avant. Pourtant il ne dénigrait pas la méthode de ces autres humains, disant que chaque méthode avait leurs avantages et leurs inconvénients… Il n’y avait pourtant aucun avantage à en tirer dans la méthode de ces parents… Ils ne devraient pas donner de l’amour à leurs enfants. Pendant que je les observais cherchant au moins un avantage à tout ça, il rajoutait alors un exemple, un avantage, d’après lui… Les enfants étaient heureux. Je prenais sur moi pour ne pas rire de cette nouvelle blague, laissant un sourire apparaître sur mes lèvres malgré tout. Je soufflais avec un léger amusement dans ma voix :

▬ Oh oui c’est vrai… Ils ont l’air de l’être. Ca leur sera…. Très utile.

Ils mourront faibles, mais avec le sourire peut-être. Si j’étais jalouse d’eux au début, l’homme avait su trouver les mots pour me réconforter et m’aider à aller mieux sans même le savoir. Je n’avais pas la moindre raison d’être jalouse de.... ça. Je serais devenue faible… Et inutile pour Lucifer… Juste une pale copie d’un potentiel gâché. J’étais devenue forte, insensible, comme devrait l’être une véritable guerrière.

▬ Désolé de vous déranger avec ça… Je devrais être plus clémente envers ses parents qui sont si aimants envers leurs enfants. De nos jours ça devient rare de voir encore ça. La plupart perdent bien vite patience de ce que je vois et ne sont pas aussi calmes qu’eux, mais comme vous dîtes, chacun à ses méthodes…

J’espérais que je n’avais pas eu l’air bizarre… Mais si c’était le cas, j’essayais de me rattraper en disant cela.

LHEINA & EZECHIEL

Laisser ces enfants vivre, s'amuser, faire leurs propres erreurs... Voila ce qu'elle venait d'accepter. Peut importait les manières dont nous étions tous éduqués. Il n'y avait pas de règle immuable pour les humains, car ils étaient tous si différents les uns des autres et libres. Libres de leurs choix, mais également de leurs erreurs.

Je n'ajoutais donc rien à ce sujet, car il avait trouvé une conclusion acceptable, au mieux de mes capacités en tout cas. Je m'étais plutôt attardé sur ses paroles m'en indiquant plus sur elle. Sur son passé. Et sur le trépas de ses parents qu'elle venait de confirmer.

« Je suis navré pour votre perte. » Je lui présentait mes hommages, non seulement parce qu'elle pouvait toujours souffrir de cette perte. Mais également et surtout, parce que toute vie humaine méritait d'être honorée, même dans la mort.

Il semblait que c'était cette perte immense qui lui rendait difficile de comprendre ce qu'elle avait sous ses yeux. Chose compréhensible, même si je ne pouvait l’appréhender véritablement. Pour ce qui était de voir les enfants heureux, elle ne l'avait peut-être pas été souvent, si elle n'avait pas eu ce genre d'expériences. Pourtant, elle sembla se réjouir pour eux, ou au moins trouver une utilité à leur bonheur.

« Je ne suis pas certain que le bonheur doive faire preuve d'une utilité... Ou alors... est-il seulement là pour contrebalancer les moments douloureux ? » Soufflais-je, dans une tentative pour apaiser ses maux, si elle en avait. Cependant, je n'étais pas certain que cela soit nécessaire, ou que ma quête soit correctement exécutée.

« Vous ne me dérangez pas… » Elle m'offrait au contraire une couverture sans pareille pour garder surveiller la traitresse que je percevais toujours plus loin. Mais plus encore, aider un humain, n'était jamais une corvée ou susceptible de me déranger.

« Il est plus difficile de comprendre ce que l'on a pas l'habitude d'expérimenter. Vous n'avez pas à vous expliquer. Je le sait parfaitement. » Je le savais trop bien, même.

« Moi même, je ne suis pas certain des explications que je vous ai donné. Cette famille vous en donnerait probablement d'autres, si nous leur demandions. La chose importante, n'est pas de comprendre, en fin de compte. Mais de se réjouir que qu'ils soient heureux, libres et candides. » N'étais-ce pas ce que méritaient les humains ? Surtout à un si jeune âge ?

Love ? What is that ?

Apparemment l’homme était navré pour la perte de mes parents…. Je le regardais sans la moindre émotion, et sans vraiment comprendre pourquoi il était navré. Je n’avais rien perdu. Ils étaient morts en m’évitant de devenir faible… Au contraire, leurs morts m’avais fais gagner bien plus que ce que j’avais « perdu »… Et si j’avais commencé à être jalouse de ses enfants qui avaient leurs parents, maintenant je comprenais le service que m’avait rendu Haakon en éliminant le problème gênant. Parce que c’était ça à mes yeux mes parents, un problème gênant, dont j’avais eu la chance de ne pas connaître. Mais vu les propos que tenait cet homme, je ne pouvais pas répondre ça bien sûr. Je soufflais alors en haussant les épaules :

▬ Oh c’est rien, ne vous en faîtes pas pour ça.

J’avais failli poursuivre en disant qu’ils ne me manquaient pas, mais je me coupais juste avant finalement. Je n’étais pas certaine que c’était quelque chose que je pouvais dire… Non j’en étais même sûre, je ne devais pas dire ça. Je rajoutais à la place :

▬ Mais merci quand même pour …. Votre soutien.

Au moins avec cette dernière phrase, il serait content et aurait l’impression qu’il avait été utile... Et il l’avait été ! Seulement pas dans le sens qu’il le pensait. Quant à l’utilité d’être heureux, j’avais dis d’une manière des plus ironique que ça leur sera très utile et l’homme ne semblait pas être totalement d’accord… Et il admettait alors que ce n’était pas vraiment utile et je prenais sur moi pour ne pas rire de cette réflexion. Évidemment que ça ne l’était pas. Pourtant après avoir dit ça, il semblait hésiter et essayer d’y trouver une quelconque utilité et… Il semblait vouloir mon approbation… Etre heureux pour contrebalancer les moments douloureux… ? Comment je pouvais le savoir ? Ca n’avait pas le moindre sens pour moi… Si on était heureux, on oubliait la douleur ? J’allais devoir vérifier ça. En attendant, je le dévisageais essayant de masquer mon incompréhension au mieux. Je soufflais simplement :

▬ Peut-être bien oui…

Je m’excusais alors de l’ennuyer avec ça mais il me reprenait en me disant que je ne le dérangeais pas… Puis il reprenait la parole et je haussais un sourcil en l’écoutant…. D’après lui, c’était difficile de comprendre ce qu’on ne connaissait pas…. Je n’avais pas à m’expliquer, il le savait parfaitement … ? Je fronçais les sourcils à ses propos, mon cerveau se mettant soudain à sonner l’alarme à ce qu’il disait ensuite. Il n’était pas certain de ses explications non plus...La chose la plus importante n’était pas de comprendre, mais de se réjouir de leurs bonheurs…. Il ne comprenait pas les sentiments, il avait été éduqué comme moi, mais il faisait l’apologie des sentiments et de l’amour sans en comprendre réellement le sens ? Est-ce qu’il était ….. ? Je sentais tout mes muscles se raidir soudain à cette pensée… L’endroit était public et le poignarder dans l’instant pour vérifier n’était peut-être pas la meilleure chose à faire…. S’il était humain, il allait se mettre à hurler et j’allais faire une erreur que Sytry n’apprécierait clairement pas. Pourtant la tentation était grande, vraiment très grande….

Je le dévisageais, soufflant finalement :

▬ Vous parlez….. Comme un ange.

Si ce n’était qu’un humain, il penserait seulement qu’il était le bon samaritain sans réellement comprendre plus loin que ça… Mais si c’était un ange, il comprendrait peut-être que je connaissais leurs existences et me dirait la vérité ? C’était mieux que de poignarder direct pour le savoir.

LHEINA & EZECHIEL

J'avais tenté d’honorer ses proches en lui présentant mes hommages en une courte phrase. Je ne souhaitait pas la brusquer ou même insister sur le sujet, car je n'était pas particulièrement à l'aise avec ce dernier. Elle avait accepté mes paroles, même si une part de moi se demandait si elle en avait nié l'utilité ou non avec sa réponse. Puis, elle m'avait remercié, mais n'étant pas friand de m'étendre sur les remerciements qui m'étaient destinés, je lui avait simplement offert un signe de tête entendu pour clôturer le sujet.

Les enfants néanmoins et leur bonheur apparent restait un point central de notre discussion. Et j'avais donné un dernier avis, malgré mes lacunes, face à la situation. Elle semblait s'accorder avec ce dernier, même si elle émettait des doutes. Chose que je ne pouvait lui reprocher, pour diverses raisons, à commencé par le libre arbitre qu'elle possédait, mais également renforcé par mon ignorance certaine, lorsqu'il s'agissait des humains. Si je n'étais pas certain de ma réponse, comment pouvait-elle l'être ?

D'ailleurs, avais-je été trop évident quant à mon inexpérience ? Je sentais toujours la déchue à portée, elle ignorait encore ma présence et il fallait que cela reste comme cela, pour maintenir la sécurité de tous les êtres humains présents. Alors, si j'avais été trop ange, ou si c'était une expression humaine qui voulait dire quelque chose que je ne saisissait pas... ça n'avait pas d'importance. Je ne pouvais pas en avoir le cœur net. J'avais une mission, cette déchue et elle s'étendait à protéger les humains autour. Rien dans cette discussion n'était plus important que cela. Car c'était tout ce que c'était, une discussion. Je ne pouvais donc pas me permettre de risquer quoi que ce soit en me révélant à l'humaine, de la panique peut-être ? Une quelconque réaction qui alerterait la déchu ? Je décidais donc d'agir comme s'il avait s'agit d'une expression humaine, écartant l'autre possibilité. Après tout, c'était potentiellement exactement cela et c'était aussi le choix le plus sage et judicieux.

« Je ne sais pas trop quoi répondre à cela. » Si expression c'était, étais-ce un compliment ? Un défaut ? J'optais pour la première option, refusant de voir ma nature, une création divine, comme une tare.

« Merci, j'imagine ?! » Fis-je maladroitement, l'interrogeant du regard.

« Il me semble également que nous avons répondu à toutes vos interrogations. Cependant... »

Le temps passait et je commençais à penser qu'il me faudrait bientôt pouvoir suivre la déchue, là ou elle irait. Alors, sans pour autant relancer une discussion compliquée, j'avais demandé :

« J'ai, moi aussi, une question. » Il ne s'agissait pas de ma première question, mais c'était la plus personnelle, si on considérait les choses et le peu qu'elle m'avait dévoilé la concernant.

« Pourquoi cette famille et les comprendre, était aussi... important pour vous ? » Elle avait dit ne pas comprendre ou ne pas avoir été élevée comme cela. Certes. J'avais une partie de réponse. Mais ma question était plus précise. J'essayais de comprendre pourquoi, ne pas les comprendre lui avait provoqué un manque ou un besoin de pallier à cela ? Était-ce une émotion humaine qui avait provoqué ça ? De la tristesse ? Autre chose ?

Love ? What is that ?

J’avais eu raison de ne pas lui sauter tout de suite dessus, pour plusieurs raisons d’ailleurs. La première étant qu’on était dans un endroit public avec beaucoup trop de témoins pour que je me risque à faire ça… Et la deuxième, je n’étais pas non plus certaine que c’était un ange même si le discours qu’il tenait était étrange, mais avec les humains, la plupart des choses qu’ils pouvaient me raconter sonnaient étrange en soit. Celui-là n’était peut-être pas si différent des autres, il ne savait même pas lui-même pourquoi être heureux semblait si important, son cerveau sûrement déjà réduit en bouillie par les anges et leurs conneries. Le pire et le plus triste dans tout ça, si du moins je serais capable de ressentir de la tristesse, c’est qu’il prenait ce que je venais de lui dire pour un compliment et il me remerciait pour l’avoir traité d’ange. Je haussais un sourcil à ça, prenant au mieux sur moi pour ne pas lui dire qu’il n’y avait aucun compliment dans ma phrase, au contraire. C’était plutôt insultant. Je n’aurais personnellement pas apprécier du tout que l’on me traite ainsi. Ces choses angéliques gênaient les plans de Lucifer, ils devraient disparaître, pas être idolâtrer comme le faisaient ces humains… Dans un léger soupir je soufflais simplement :

▬ De rien…

Si ça lui faisait plaisir de se faire insulter après tout, c’était lui qui voyait. Il poursuivait alors en me disant qu’il avait lui aussi une question… Je le regardais, espérant que ce ne serait pas une question difficile et …. Ca ne manquait pas, évidemment. Pourquoi cette famille et vouloir les comprendre était important pour moi ? La vraie réponse, il ne pouvait pas l’avoir. Pas vu l’influence qu’avait déjà les anges sur lui, c’était quasiment impossible de se montrer honnête avec les humains, surtout ceux dans son genre… Je réfléchissais rapidement à une réponse qui pourrait convenir à quelqu’un comme lui, finissant par répondre en haussant les épaules :

▬ Simple curiosité… J’aime comprendre ce qui m’entoure, pas vous ?

Il devra se contenter de ça. Je n’allais pas lui dire que j’avais été jalouse durant un bref instant de leurs faiblesses, j’avais échappé au pire grâce aux démons, je n’avais aucune raison d’être jalouse. Et puis connaître les faiblesses de mes proies, c’était toujours un bon point de pris. Sans compter qu’il m’avait donné des idées pour tester si réellement être heureux pouvait compenser la douleur…. Si du moins j’avais bien compris ses explications, mais ça, je pourrais toujours y voir quand je passerais à la pratique pour vérifier ses arguments qui étaient assez faibles, surtout quand lui-même avouait ne pas savoir en quoi ça pouvait réellement être utile. Plutôt ironique. Au moins moi je savais pourquoi j’avais été éduqué à la dure, il y avait une vraie raison à ça, contrairement à ces humains.

LHEINA & EZECHIEL

Même si je ne pouvais être certain de rien, j'avais tendance à croire avec le temps qui défilait, que l'activité de cette déchue arriverait bientôt à son terme. Ils ne pouvaient pas se mouvoir indéfiniment de la sorte, après tout ? Aussi, il ne me fallait pas lancer de conversation que je ne pourrais pas clôturer rapidement, car mon intention en discutant avec cette humaine pour paraitre moins suspect était également de l'aider. Quand j'avais cru qu'elle avait besoin d'aide, cela va s'en dire. A présent, si je ne pouvais pas lui venir en aide en plus de la couverture qu'elle m'offrait, je pouvait au moins lui offrir le respect qu'elle méritait.

Son "de rien" me laissait penser que j'avais vu juste et qu'elle avait en effet tenté de me faire un compliment. J'avais donc été inspiré dans mes réflexions, de ne pas révéler ce que j'étais. La chose aurait de toute façon été bien trop risquée, sans même qu'il s'agisse de ses connaissances.

« J'aime comprendre certaines choses, également. Mais... j'imagine qu'on ne peut pas tout comprendre. Parfois, on fonctionne... ou on a été élevé différemment d'autres personnes. Ce qui rend la compréhension plus... difficile ou de surface. »

J'avais dans l'idée que ça n'était pas quelque chose uniquement réservé aux anges. N'était-il pas possible d'être humain, de ressentir les choses et pourtant de le faire différemment d'un autre ? Tous n'étaient pas les même, c'était pour cela que c'était aussi compliqué pour moi de les déchiffrer. Pas un seul réagissait de la même façon à la tristesse, à la colère... Alors comment pouvions-nous en une seule observation déterminer ou comprendre réellement qui ou quoi que ce soit ?

Mes pensées s'étaient vues empiétées par une perception toute autre, l'aura de la déchu devenait plus forte, plus proche. J'avais donc vu juste et elle en avait terminé. Il ne m'était pas nécessaire de bouger immédiatement, puisqu'il semblait évident qu'elle marchait dans ma direction, sans même réaliser ma présence. Cette discussion avait été d'une aide précieuse dans cette traque. Mon don de détection braqué sur la déchue, j'avais repris la parole, continuant de me mêler aux humains.

« Je vais devoir vous laisser. J'ai plusieurs choses à faire. Mais... c'était un plaisir de vous rencontrer et de discuter avec vous. » Au lieu d'une révérence j'avais opté pour un sourire, qui paraissait plus humain. Même si ça n'était pas quelque chose qui me venait naturellement. J'avais alors attendu quelques secondes, que la déchue nous dépasse pleinement et avait repris ma route à sa suite. Discret et prêt à attaquer dès que le moment opportun se présenterais...